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Frankfurt, Ich komme...
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16 juillet 2008

645 Kms à la nage, 10253 Kms de vélos et un peu

645 Kms à la nage, 10253 Kms de vélos et un peu moins de 3500 Kms pour la détente à pied. C’est le total d’une année d’entraînement pour en arriver là.

Dimanche 13 Juillet 2008, Lac de Zurich, Suisse, 07h du matin. Je fais le vide, je revois mon plan de course et mes ravitos. Je n’ai rien oublié et je suis prêt, même la pluie qui tombe, fortement depuis la nuit dernière, s’est légèrement calmé même si le ciel reste bouché.

Je ne sais pas à quoi pense les gars qui m’entourent, j’aimerais bien parfois. Perso, je revois toutes les personnes qui m’ont soutenus, aidés, de prêt ou de loin. Je me remémore les conseils (les encouragements dans les moments difficiles de ma prépa) de Coach Chris et sa motivation, je sais qu’il sera devant son écran, l’athlete Finder fonctionnant à bloc. Je pense, comme à Nice, à ma sœur Véro, cloué dans son fauteuil roulant qui m’a toujours poussé pour que je me dépasse et qui m’aurait sûrement accompagné dans mes délires sportifs. Je pense à mon père qui aurait été fier de moi. Au final, c’est à ma chérie que je pense car c’est elle aussi qui va courir avec moi. Toi aussi tu as subi ma prépa, toi aussi tu as subi mes défaillances, mes joies, mes doutes mais tu as surtout eu confiance en moi et tu as toujours eu énormément de patience pour me supporter. Rien que pour ça, j’ai une chance folle et je le sais, Merci.

Retour à la réalité. L’eau est bonne, plus chaude que la température extérieure qui caille plus que les autres jours, je ne vois pas les bouées au large mais je suivrais la masse, bin oui quoi, être nul en natation ne peut pas avoir que des désavantages. Mis à l’eau tranquille car contrairement aux autres années, le départ sera donné à quelques 200m du bord. Serein, les pros sont désormais loin et je suis surpris par le départ que certains ont volé et qui ont emmené la masse. Je ne mets pas longtemps à nager sans encombre car les entraînements ont encore payé, j’ai pris un départ plutôt rapide afin de faire le trou et être tranquille. La premiére boucle est rapidement finie, en 26 minutes pour moi et je suis content de ce temps mais je me dis qu’il ne faut pas que je lache, maintiens le cap. Comme d’hab, j’ai un petit coup d’œil pour les tricheurs qui coupent la natation mais pas grave, ce sont des morts que je ramasserais en vélo. Le deuxième tour va être sûrement plus difficile car le temps se détériore grandement, je ne vois pas à 50m. Passage à l’australienne où je double quelques mecs dont certains abandonnent déjà.

Le deuxième tour est à l’identique du premier mais j’ai beaucoup plus de mal à me repérer et à avancer. Des mecs me rattrapent, ont tout le lac pour passer mais c’est moins marrant que de me monter dessus. 01h00’40, c’est mon temps au passage du portique qui se situe à 150m de la sortie de l’eau. Pas mal et dans l’ordre de marche que je m’étais fixé, malgré mes petits soucis de combi juste avant le départ, celle-ci s’est déchirée sur le raccord au-dessus des fesses, laissant passer l’eau. Mauvais présage ?

La transition fut beaucoup plus longue que prévue du fait de la pluie. Les chaussettes qui ne s’enfilent pas, la bâche du vélo qui ne se barre pas, les chaussures trempées, le coupe-vent qui ne sera utile que sur un tour… Bref, c’est la fête. Après 3’10, je sors du parc et me lancent dans mon deuxième défi, y revenir dans moins de 5 heures.

J’ai confiance en mes jambes et celles-ci répondent parfaitement dés mes premiers tours de manivelles. Je ne ressens aucune gêne, je suis dans les meilleures conditions possibles et rien ne peut m’arriver. Après les 30 premiers Kms, tout plat et vent de dos, à prés de 50 Kms/h, j’ai déjà remonté pas mal de mecs dont des petits groupes mais rien de bien méchant car de toutes façons, ils n’arrivent pas à prendre ma roue donc ça ne me gène pas. La pluie est bien présente par contre, le froid aussi, le vent s’est levé et je crains que ça ne fasse qu’empirer. Les premières bosses sont passées facilement, là ou les mecs sortis devant moi peinent à grimper. Cela me remonte grandement le moral et me motive énormément malgré le peu de personnes présentent sur le bord des routes du fait de la météo. Les kilomètres s’enchaînent sur le même rythme quand arrive le gros morceau de la journée pour moi, « the beast », une cote à 5% sur 3-4 Kms au 52éme Km qui doit faire mal à tout le monde. J’ai l’impression que celle-ci est beaucoup moins dure que lors de mes repérages et je la passe à un rythme soutenu qui me laisse dubitatif quand à mon état de forme. J’arrive à larguer les mecs avec qui je roulais jusqu’alors mais je reste avec 3 gars, 3 américains mais aucun dans mon groupe d’age alors je m’en fous un peu. La descente qui suit est hyper rapide et la pluie file apparemment la frousse aux amerloques qui sont debout sur les freins, à croire qu’ils ne paient pas les patins. Le faux plat à 2% sur 5kms, qui suit « the beast » et sa descente, est rendu compliqué par l’accumulation d’effort, le premier passage est aisé mais l’accumulation d’effort au second tour risque de faire très mal.

Suite à ce faux plat, le retour sur Zurich se fait à vitesse grand V car fait de grandes et belles descentes ultra-rapides mais les premiers soucis commencent à apparaître et ce n’est pas très rassurant. Comme je l’ai dis au début de ce post, la pluie et le vent sont de la partie mais je n’ai pas vraiment la tenue adéquate malheureusement et je commence à ressentir le froid de plus en plus ? J’espère simplement que je tiendrais le coup jusqu’au départ du marathon.

Passage devant les tribunes et l’aire de départ, le parc à vélo ou le public est vraiment beaucoup plus en nombre. Pas le temps de m’attarder pour mes nombreux fans qui m’acclament J car direction Earthbreakhill que j’avais un peu zappé. C’est à ce moment que je m’aperçois que je rattrape très rapidement un gars, un pro en plus, Français de surcroît et je m’aperçois que c’est Nicolas Tabarant. Je suis extrêmement étonné, déjà de le rattraper, et de le voir là. Arrivé à sa hauteur, j’essaie d’échanger quelques mots avec lui mais il est complétement frigorifié et J’apprendrais quelques jours plus tard qu’il a abandonné un peu plus loin.

L’ascension est rendue plus facile par le nombre très important de spectateurs qui n’ont de cesse de nous encourager mais bon, ça grimpe quand même et ça fait mal après 80kms. Là encore, je me sens super bien et j’arrive à rester sur un super élan, sans grosse difficulté malgré le pourcentage important. En plus, en haut m’attend ma chérie et mon ravito perso, ce qui donne aussi de l’entrain.

Ça y est, c’est fini pour ce tour ci et je balance mes bidons dans l’aire réservée pour ça à la différence des autres concurrents qui les lachent carrément en pleine route, juste devant nos roues, juste en face des marshalls qui ne bronchent toujours pas. Bref, le principal est que madame est bien là, à m’attendre avec mon ravitaillement. Tout a déjà été calculé et le changement de bidons, ainsi que la remise des gels pour la fin de course s’est fait en moins de 30 secondes, et me permet de repartir de plus belle mais en prenant le temps de faire un petit bisou à madame, faut toujours penser à l’après-course ;-)

Passage au 90éme Kms, soit un nouveau passage devant le parc à vélo et let’s go pour un nouveau tour. Mon temps est de 02h25 à ce moment là, un peu en avance sur ce que je prévoyais mais je ne veux pas m’enflammer car je pense que c’est maintenant que la course commence. Le froid me prend de plus en plus et je sens que mes jambes se tétanisent, j’espere simplement que je tiendrais le coup jusqu’au bout car je suis en excellente position et je sais que c’est durant le marathon que je pourrais faire la différence.

Ce tour commence à peine qu’un groupe de trente mecs me rattrapent, bien alignés et à 1m les uns des autres. Comme d’hab, je gueule un coup en anglais mais la seule réponse qui me fut faite, fut un joli doigt tendu suivi de quelques insultes bien senties, je me croirais revenu à Mimizan, j’ai même regardé si il n’y avait pas Maubras… Bin non, ce n’est pas possible, c’est une fiotte, il ne fait pas d’Ironman car c’est trop dur d’y tricher. J’arrive néanmoins à les larguer dés le 30éme km et la succession de petites bosses casse-pattes. Le reste du parcours me permet de maintenir un écart évident mais je sens bien que le rythme n’est plus le même, les jambes sont lourdes et j’ai sérieusement froid. Les descentes me glacent les doigts et les 3 amerloques que j’avais réussi à larguer lors de la premiére ascension de « the beast » me reprennent, eux aussi bien alignés. Les descentes suivantes sont un vrai calvaire et le faux plat me parait durer 3 plombes. J’ai les dents qui claquent, du mal à m’alimenter et à boire correctement mais je me force en me disant que le marathon sera mon juge de paix, en tout cas, je me persuade de ça afin de garder le rythme même si je vois bien que mon polar m’indiquent une vitesse moins élevée et des puls, elle, qui ne font que monter. N’ai-je pas trop forcé sur le premier tour ? Me suis-je bien alimenté ? Est-ce que ça va passer ? Je me pose 10000 questions mais essaie quand même de me concentrer.

Voilà, les principales difficultés sont passées, je me retrouve seul sur le retour tout plat jusqu’à Zurich. Malheureusement, je suis repris par de petits groupes qui me fusillent un peu le moral mais je m’accroche ? Je n’ai pas fais 10 mois de sacrifice pour lacher le morceau et je prouverais à ces tricheurs que lorsque l’on est fort, tricher ne sert à rien.

Earthbreakhill est déjà là, je le passe avec vraiment plus de difficulté que la premiére fois mais me motive en me disant que dans 3h30, je serais en partance pour Kona. Bin oui, on se motive comme on peut.

Retour au parc en 05h15, avec le 205éme temps mais je n’ai pas le temps de m’en rendre compte qu’il faut que je pense à ne rien oublier lors de la transition. Je retrouve mes chaussures qui n’ont pas pris l’eau, et c’est déjà bien mais bon, je les avais placé dans un sac ziploc donc forcement étanche, tout comme mes chaussettes et c’est une vraie bénédiction. La transition est un peu plus longue que prévue une nouvelle fois car je suis frigorifié et m’aperçoit que mes doigts sont bleus, j’ai un mal fou à enfiler mes chaussettes et mes chaussures. Je décide de garder mes manchettes mais de virer ma veste coupe-vent pour le marathon qui risque d’être un peu plus compliqué que prévu mais je pense que peux encore me qualifier, surtout si je claque un marathon en 3h10-20 comme il est prévu.

Et me voilà parti pour le dernier tryptique de ma journée. Dés le début du marathon, je m’aperçois que les abandons sont légions et c’est tout bon pour moi, j’ai une petite pensée pour mon pote Fred de l’O.N.N. et me demande ou il peut en être ?

Les premiers kilomètres sont effectués prudemment et j’accélère progressivement pour atteindre ma vitesse de croisière dés le 3éme, à savoir 4’30 au Kms. Je rattrape du monde, mais le froid me tient de plus en plus, les ravitos étant nombreux, je m’efforce de prendre du potage en espérant que cela me réchauffera quelques peu mais petit à petit, je sens mes forces me quittaient.

Le premier tour se termine et Virginie, renseignée par le coach depuis Bordeaux, m’informe que la qualif. est dans la poche mais qu’il faut tenir car il y a tout de même du monde derrière. 1er tour : 41’23. C’est beaucoup trop rapide et décide me calmer en prévision des difficultés à venir mais dés le 12éme Km, le vent se lève et le froid me tiraille de plus en plus. Malheureusement, au 15éme Kms, une rafale de vent plus importante que les autres me scotchent sur place ainsi que les 4 mecs qui me précédent et que je rattrapais, tous dans le même tour que moi. Je suis transi, je grelotte et claque des dents, je suis obligé de marcher car je ne peux pas faire autrement. Pas grave, je me dis que ça va passer et je marche pour ne pas perdre trop de temps. Au ravito suivant, je me gave de soupe et m’en asperge même afin d’augmenter ma température personnelle mais rien à faire.

Là, j’avoue, je commence à paniquer même si peu de personnes m’ont doublé. Je cherche un toubib ou quelqu’un qui pourrait m’aider mais rien, personne ne vient à mon aide malgré le froid qui est bien présent. Les spectateurs continuent malgré tout à m’encourager et je m’efforce de continuer coûte que coûte. Incroyable, personne de l’organisation n’est capable de m’apporter de l’aide, ne serait-ce qu’une couverture de survie pour me réchauffer mais par contre, me pousser à l’abandon, à ça, y avait du monde. Heureusement, c’est une spectatrice qui m’a donné son poncho en plastique pour me protéger du vent et de la pluie.

Malgré ça, malgré toute mon envie et ma force, les éléments ont été les plus forts aujourd’hui. Sachant la course perdue pour moi, je me suis dit qu’abandonner n’était plus d’actualité par respect pour Christophe et Virginie qui aura passé la journée tout comme moi sous le déluge mais j’allais marcher, marcher jusqu’à pouvoir repartir, recommencer à courir puis finalement, marcher jusqu’à ce que mon pote Fred me rejoigne. Et il en a mis du temps le bougre, il se traînait plus que moi mais il a finalement pu me reprendre et j’ai fini la course en sa compagnie car le pauvre n’était pas au mieux non plus et voulait même abandonner, si je ne l’avais pas poussé.

cyril_et_fred

Les derniers kilomètres sont un vrai calvaire mental mais pas physique, je me remémore mes séances, mes sacrifices et me dis que tout cela n’a servi à rien ou presque, simplement à me conforter dans l’idée que je peux me qualifier et que j’en ai la capacité, et ça, c’est extrêmement enrichissant et motivant. Point positif aussi, je sais que cette course est perdue mais je pense déjà à l’avenir et notamment à St-Jean-de-Luz ou je pourrais faire péter un score.

cyril_zurich

La dernière ligne droite et je me rends compte que je suis vraiment passé à côté de quelque chose d’énorme, les nerfs lachent et c’est Fred qui me poussent pour que je passe devant lui. Le cœur n’y est plus et c’est tête baissée que je finis cet Ironman. Fred, lui est heureux d’en finir tant ce fut une course rendu difficile par la météo et je suis heureux de finir avec mon pote mais le cœur est lourd, à tel point que je refuse dans un premier temps la médaille de finisher que l’on me tend mais finit par l’accepter sur l’insistance de la volontaire. J’ai du mal à retenir mes larmes de colère et je craque, bin oui, je craque quand ma chérie me rejoint. Il est dur de sacrifier une partie de son année pour en arriver là. Surtout que c’était peut-être ma dernière chance à la vue de ma vie future.

Beaucoup de regret donc mais le sentiment est différend qu’après Nice car l’année dernière, ma natation n’avait pas été top, mon vélo pété m’avait empêché de faire ce que je voulais et à pied, je n’avais pas non plus forcé. Aujourd’hui, j’étais prêt je pense, costaud même si j’ai encore une marge de progression mais je me rends compte aussi que l’investissement nécessaire pour être performant n’est peut-être pas en phase avec ma vie professionnelle actuelle. Des regrets, voilà ce qui ressortira de cette course et le sentiment que j’ai aussi commis une grosse boulette en mésestimant la météo. Sur ce point, j’ai commis une erreur de débutant qui m’étonne encore, en ne prenant pas les équipements nécessaire pour me protéger des intempéries. « Ce qui ne me tue pas, me rend plus fort », voilà qui est particulièrement vrai aujourd’hui d’autant plus que j’avais pris de quoi me remonter un vélo en entier si d’aventure une pièce venait à casser.

Ruminer ne sert à rien mais la frustration est bien présente, en plus, je ne peux m’en prendre qu’à moi. L’après-course risque d’être difficile…

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Commentaires
1
mais t'es con toi hein ???????
V
Super CR, on a l'impression d'y être !!<br /> Après (on a dû te le répéter XXX fois) ça ne reste que du sport... ;-)
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